Un tournant décisif s’annonce dans le secteur du transport aérien en Algérie. Les compagnies aériennes étrangères opérant sur le territoire algérien sont désormais tenues de respecter une mesure qui risque de bouleverser leurs habitudes commerciales : la vente de certains billets d’avion devra impérativement se faire en devises. Cette obligation, déjà encadrée par les textes en vigueur de la Banque d’Algérie, vise à corriger une pratique longtemps tolérée mais pourtant contraire à la loi. Il s’agit d’une décision qui impose un changement profond dans la manière dont les billets d’avion sont émis et payés en Algérie, notamment lorsqu’il est question de devises.
Depuis des années, certaines compagnies étrangères, actives en Algérie, proposaient à la vente des billets d’avion pour des destinations long-courriers avec escales, non desservies par Air Algérie, et ce, en dinar algérien. Cette méthode, bien qu’elle ait profité à des milliers de voyageurs, représente une infraction aux règles de change établies. Le règlement de la Banque d’Algérie stipule en effet que les billets d’avion doivent être émis en devises dès lors qu’il s’agit de trajets répondant à certains critères précis, notamment les longues distances et les escales internationales. La vente de ces billets en devises garantit un retour légal de la transaction vers le trésor public, conformément aux procédures de la finance internationale.
Mais la tolérance a atteint ses limites. Avec le déploiement du nouveau système numérique mis en place par la douane algérienne, appelé Alces, l’État entend bien mettre fin à ces transactions opaques. Le système Alces permettra de surveiller et de contrôler en temps réel la conformité des ventes de billets d’avion avec la législation algérienne sur les devises. Cela signifie que les billets émis en Algérie, par des compagnies étrangères, ne pourront plus échapper à l’obligation du paiement en devises lorsque cela est requis.
Selon le journal arabophone Echourouk, dans son édition du samedi 24 mai, plusieurs agences de voyages ont reçu des correspondances jugées « urgentes » émanant de compagnies aériennes étrangères. Ces correspondances appellent les agences à redoubler de vigilance lors de la vente des billets d’avion concernés par le règlement de la Banque d’Algérie, insistant sur la nécessité de respecter scrupuleusement l’obligation de paiement en devises. La pression est donc montée d’un cran, et le message est clair : les billets d’avion ne pourront plus être vendus en dinars là où la réglementation impose les devises.
Une compagnie aérienne étrangère, très présente en Algérie, a précisé dans un document officiel les modalités à suivre dans le cadre de cette réforme. Elle rappelle que la vente des billets vers certaines destinations, définies par la Banque d’Algérie, doit respecter un seuil de paiement en devises, qui s’applique à une partie significative du prix du billet. Cette procédure s’inscrit dans une volonté de transparence financière et de lutte contre les transferts illégaux de capitaux.
Car derrière cette décision radicale de l’Algérie concernant les billets d’avion et les devises, se cache un enjeu majeur : la fuite de richesses vers l’étranger. En vendant des billets en dinars, puis en convertissant les montants en devises avant de les transférer hors du pays, certaines compagnies ont détourné d’importantes sommes d’argent. Selon une enquête citée par la douane algérienne, ces pratiques ont entraîné des pertes colossales pour le trésor public. En plus des transferts illégaux, de nombreuses fausses déclarations sur le montant réel des billets vendus ont également été constatées.
Le document évoqué appelle donc les agences à appliquer strictement la réglementation algérienne sur les devises et les billets d’avion, en conformité avec le nouveau système mis en œuvre par la douane. L’objectif est clair : restaurer la légalité des transactions liées à l’achat de billets d’avion en Algérie, en s’assurant que les devises circulent dans un cadre formel et contrôlé. Les billets d’avion, dans ce contexte, ne sont plus de simples titres de transport, mais un outil de régulation économique.
L’Algérie, à travers cette réforme, envoie un signal fort : les devises ne doivent plus quitter le pays sans contrepartie légale. Chaque billet d’avion vendu en dehors des règles fixées représente une perte directe pour l’économie nationale. En imposant le paiement en devises pour les billets concernés, l’Algérie entend protéger ses ressources, renforcer la traçabilité des flux financiers et affirmer sa souveraineté monétaire face à des pratiques qui ont longtemps échappé au radar.