L’Algérie s’apprête à renforcer significativement son arsenal juridique face à la menace croissante que représente le trafic de stupéfiants sur son territoire. Le gouvernement a présenté un nouveau projet de loi visant à prévenir et réprimer l’usage et le commerce illicite de drogues et de substances psychotropes. Ce texte, soumis à la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l’Assemblée populaire nationale, introduit des mesures inédites, allant de la peine de mort dans certains cas extrêmes jusqu’à des sanctions administratives lourdes telles que l’interdiction de séjour ou la déchéance de nationalité, mais uniquement pour les étrangers ou les personnes ayant acquis la nationalité algérienne par naturalisation en Algérie.
Depuis la loi de 2004 consacrée à la lutte contre les stupéfiants, l’Algérie avait déjà adopté une posture rigoureuse. Néanmoins, la persistance, voire l’aggravation du phénomène, a poussé les autorités à proposer des dispositions encore plus dissuasives. Le nouveau texte élargit le champ des infractions en criminalisant de nouveaux comportements et en aggravant les peines pour les actes impliquant des mineurs ou se déroulant à proximité d’établissements éducatifs, médicaux ou sociaux. La réclusion criminelle de 20 à 30 ans est désormais prévue pour ceux qui incitent ou recrutent des mineurs dans des activités liées à la drogue.
Mais le point le plus marquant de ce projet est l’introduction de la peine de mort pour les crimes les plus graves, notamment lorsque les actes entraînent la mort ou des atteintes graves à la santé publique. Cette peine capitale est également envisagée lorsque les infractions sont commises dans un cadre transnational, avec usage ou menace d’armes à feu, ou encore dans le but de nuire à la sécurité nationale. Les peines sont alourdies en cas de récidive, et le texte exclut la possibilité de circonstances atténuantes dans les affaires où les drogues ont causé des conséquences graves.
Des étrangers risquent la déchéance de nationalité en Algérie
Par ailleurs, le projet de loi prévoit des dispositions spécifiques contre les étrangers impliqués dans de tels crimes. Ainsi, l’interdiction définitive de séjour sur le territoire algérien pourra être prononcée à leur encontre. Il s’agit d’une mesure administrative forte destinée à écarter durablement toute personne étrangère reconnue coupable de trafic ou d’usage illicite de stupéfiants. De même, la déchéance de la nationalité algérienne est désormais envisageable, mais uniquement pour les personnes l’ayant acquise par naturalisation, et non pour les citoyens algériens de naissance en Algérie. Cette disposition vise à retirer la nationalité à ceux qui, malgré leur intégration juridique dans la communauté nationale, se rendent coupables de crimes considérés comme particulièrement graves et menaçant directement la sécurité de l’État.
Le texte insiste également sur l’aspect préventif. Il rend les tests de dépistage obligatoires pour les recrutements dans les secteurs public et privé, tout en introduisant des campagnes de dépistage précoce auprès des élèves, avec le consentement des parents ou d’un juge des mineurs. En cas de test positif, une cure de désintoxication encadrée par la justice est mise en œuvre, sans poursuite judiciaire, dans une logique de traitement plutôt que de sanction systématique.
Le projet de loi prévoit en outre l’autorisation pour le parquet, les juges d’instruction et la police judiciaire de mener des enquêtes financières approfondies afin de remonter aux sources de financement et aux avoirs issus du trafic, que ces biens soient situés en Algérie ou à l’étranger. Les suspects pourront faire l’objet de restrictions de voyage, de saisies conservatoires, et leurs identités ainsi que leurs photos pourront être publiées dans le cadre des condamnations. Si un non-lieu ou un acquittement est prononcé de façon définitive, toutes ces mesures seront levées automatiquement.
Enfin, le projet inclut une innovation notable : la possibilité de récompenses financières pour les citoyens qui signalent des cas de trafic ou de consommation de drogue. Cette mesure vise à impliquer la société civile dans la lutte contre ce fléau, en faisant du signalement un acte de responsabilité et de soutien aux efforts de l’État.
À travers ce projet de loi, l’Algérie affiche clairement sa volonté de dissuader les trafiquants, de protéger sa jeunesse et de sanctuariser sa sécurité intérieure. Les nouvelles sanctions, notamment l’interdiction de séjour pour les étrangers et la déchéance de la nationalité acquise, symbolisent ce changement de paradigme qui allie prévention, fermeté et engagement collectif.