C’est une affaire judiciaire qui éclaire les ramifications discrètes, mais bien rodées, d’un trafic de documents en apparence officiels, mais pourtant totalement frauduleux. Mardi, la dixième chambre criminelle du tribunal d’Alger s’est penchée sur le dossier d’un ressortissant algérien vivant en France, poursuivi pour des faits de faux et usage de faux de cartes d’identité françaises en Algérie, avec en toile de fond une tentative de franchissement illégal des frontières. Trois autres prévenus, eux aussi impliqués dans cette affaire, comparaissaient à ses côtés dans une affaire qui remonte jusqu’aux docks du port d’Alger.
Tout aurait commencé lorsque le principal accusé, de passage en Algérie, se serait vanté auprès de certains compatriotes de pouvoir leur obtenir, contre rémunération, de véritables cartes d’identité françaises. S’appuyant sur son statut de résident français et prétendant bénéficier de l’aide de membres de sa famille bien placés, il aurait convaincu ses interlocuteurs de la simplicité du processus. En échange, il exigeait des sommes colossales. Le tarif annoncé pour l’obtention d’une carte atteignait la somme de 180 millions de centimes, soit environ 30.000 euros, un montant que plusieurs candidats à l’émigration étaient visiblement prêts à payer.
Le montage se faisait en plusieurs étapes, selon Ennahar : une fois l’accord passé et les fonds versés, le prévenu principal faisait appel à un complice vivant en France, chargé de fabriquer les fausses pièces. Ces dernières étaient ensuite envoyées en Algérie, où un autre membre du réseau, agissant comme relais local, remettait les documents aux « clients ». C’est à cette étape que les failles du système ont commencé à apparaître.
L’un des acheteurs de ces faux papiers a été intercepté au port d’Alger, en possession d’une fausse carte d’identité tricolore, alors qu’il s’apprêtait à embarquer. Un autre a été arrêté à l’aéroport, sur le point de voyager vers l’Espagne avec sa famille. Dans les deux cas, les contrôles ont permis de déceler l’irrégularité des documents, déclenchant une enquête en cascade. Les suspects, confrontés aux faits, ont été entendus longuement. Certains ont reconnu avoir versé de l’argent pour l’obtention du document, dont un chauffeur de camion domicilié à El Oued, qui a affirmé avoir remis les 180 millions de centimes sans savoir que la carte était falsifiée. Un autre a déclaré avoir acquis la sienne pour 30.000 euros par l’intermédiaire d’un proche, qui l’aurait mis en relation avec un jeune vivant en France.
Le principal accusé, quant à lui, nie tout en bloc. Devant le juge, il a assuré n’avoir jamais eu affaire aux autres prévenus, ni participé à la fabrication ou à la distribution des pièces incriminées. Malgré ses dénégations, ses déclarations ont été contredites par les témoignages des coaccusés et les preuves matérielles recueillies durant l’enquête. Les liens entre les protagonistes semblent pourtant étayés par des échanges et des transferts financiers formels.
Le parquet, face à la gravité des accusations, a requis des peines de prison significatives. Le rôle de chef d’orchestre attribué au principal mis en cause justifierait, selon le ministère public, une peine pouvant aller jusqu’à sept années de réclusion. Quant aux complices, ils risquent entre deux et cinq ans de prison, selon leur degré d’implication dans l’affaire.
Ce dossier met en lumière un phénomène préoccupant : la circulation de faux documents à des fins d’émigration clandestine, dans un contexte où le rêve d’une vie meilleure pousse certains à prendre tous les risques, y compris celui de se mettre en danger face à la justice.
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