Une nouvelle ère s’ouvre pour les transactions financières en Algérie. Le paiement en espèces en dinar algérien, longtemps dominant dans les secteurs de l’immobilier, de l’automobile et des équipements de valeur, vient de subir un véritable coup d’arrêt. Cette fois, la consigne est formelle : les notaires sont officiellement tenus de refuser toute opération de vente qui ne serait pas réglée via des circuits bancaires ou électroniques. C’est dans une circulaire sans équivoque que la Chambre nationale des notaires a transmis, au cours de ces derniers jours, l’ordre d’application immédiate de l’article 207 de la Loi de Finances 2025, rendant obligatoire l’usage de moyens de paiement traçables pour toute transaction importante.
Ce tournant historique, relatif au dinar algérien, s’inscrit dans une volonté de modernisation de l’économie nationale, mais surtout dans une stratégie déterminée de lutte contre l’économie parallèle, véritable frein au développement du pays. Depuis le mois d’avril, les notaires doivent désormais mentionner explicitement la méthode de paiement utilisée dans chaque acte, avec les références bancaires afférentes, et prouver que l’opération a été réglée dans son intégralité ou en partie par virement, chèque ou carte.
Le président de la Chambre nationale des notaires, Ramdane Bougouffa, a pris les devants en diffusant dès le 23 avril une correspondance officielle à toutes les chambres régionales du pays. Cette dernière précise sans ambiguïté les nouvelles obligations qui pèsent sur les professionnels du notariat. Fini les paiements en liquide lors des ventes de véhicules, d’appartements, de terrains ou de biens à forte valeur ajoutée. Qu’il s’agisse d’un yacht, d’une machine industrielle ou même d’une simple voiture achetée chez un concessionnaire, le paiement doit impérativement passer par les circuits officiels. Cette obligation s’applique également à la souscription d’assurances obligatoires, autant d’opérations qui doivent désormais laisser une trace bancaire vérifiable. Dans les faits, cela signifie que le rôle du notaire s’alourdit : il ne suffit plus de constater une vente, il faut désormais en contrôler le financement, vérifier les relevés, consigner les preuves et assumer la responsabilité de cette vérification dans les registres.
La décision ne touche pas uniquement le secteur notarial. Elle s’inscrit dans une politique globale de transition numérique. Le barreau algérien, par le biais d’une circulaire signée le 23 avril par Chaïb Seddik, secrétaire de l’Ordre des avocats, a emboîté le pas. Les guichets uniques des services judiciaires doivent désormais être équipés de terminaux de paiement électronique (TPE), favorisant ainsi le paiement sécurisé, rapide, et surtout traçable. Cette coordination interprofessionnelle démontre l’ampleur de l’opération en cours : il ne s’agit pas seulement d’un changement technique, mais d’une transformation profonde du mode de fonctionnement économique et administratif du pays.
Les bénéfices escomptés de cette transition sont multiples. D’un côté, elle permet de limiter la circulation du dinar algérien non déclaré et de lutter plus efficacement contre la fraude fiscale. De l’autre, elle ouvre la porte à de nouveaux produits financiers adaptés à une économie digitale : paiement différé, microcrédit en ligne, assurance numérique ou encore achats en plusieurs fois. Avec ces outils modernes, les citoyens gagnent en sécurité, les professionnels en efficacité, et l’État en recettes. Plus encore, cette évolution est un signal fort envoyé aux investisseurs et aux partenaires économiques étrangers : l’Algérie est en train d’aligner ses pratiques sur les standards internationaux, posant ainsi les bases d’un climat d’affaires plus transparent et plus attractif.
Ainsi, cette décision radicale de mettre fin aux paiements en espèces dans les transactions majeures est bien plus qu’une simple mesure administrative. Elle marque une rupture avec les pratiques du passé, une prise de position ferme contre l’économie informelle, et un pas décisif vers une Algérie connectée, moderne et économiquement souveraine. Le dinar algérien, encadré désormais par des circuits officiels, entre dans une nouvelle phase de son histoire, celle d’une devise appelée à circuler dans un écosystème contrôlé, sécurisé et tourné vers l’avenir.