Droits de douane instaurés par Trump : une aubaine pour le Maroc ? 

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Depuis l’annonce retentissante de l’administration Trump sur l’instauration de nouveaux droits de douane, le paysage commercial mondial a été profondément bouleversé. Si les mesures protectionnistes américaines ont secoué les partenaires traditionnels comme l’Union européenne, la Corée du Sud ou encore le Japon – tous frappés par des hausses tarifaires d’au moins 20 % – certains pays jusque-là relégués en marge du commerce mondial se retrouvent soudainement sous les projecteurs. C’est le cas du Maroc, qui semble bénéficier d’une conjoncture favorable dans ce jeu de chaises musicales diplomatiques et économiques, imposé par Trump.

Contrairement à l’Algérie, qui a vu ses droits de douane bondir de 19 % à 30 % dans le sillage de la politique commerciale américaine, le Maroc conserve un taux relativement bas de 10 %. Une différence qui, sur le papier, peut paraître anodine, mais qui pourrait se transformer en avantage stratégique considérable pour le Royaume chérifien. D’autant plus que le Maroc dispose d’un accord de libre-échange avec les États-Unis, ce qui en fait un partenaire encore plus attractif pour les investisseurs internationaux cherchant à contourner les nouvelles barrières tarifaires américaines.

Alors que la Chine, le Bangladesh ou encore le Vietnam sont particulièrement touchés par les hausses de droits de douane – jusqu’à 46 % dans certains cas – des pays comme le Maroc, la Turquie ou l’Égypte apparaissent comme des options alternatives séduisantes. Ces États partagent une caractéristique commune : un déficit commercial vis-à-vis de Washington, ce qui semble les épargner, du moins temporairement, des foudres tarifaires américaines. Dans cette reconfiguration des flux d’échanges, le Maroc se distingue non seulement par la modération des droits qui le touchent, mais aussi par son positionnement géographique stratégique aux portes de l’Europe, et par sa stabilité politique relative qui rassure les milieux d’affaires.

Des secteurs clés pourraient en profiter rapidement. L’industrie textile, par exemple, qui souffre de la montée des tarifs sur les produits venus d’Asie, pourrait migrer vers des zones comme Tanger ou Casablanca, où la main-d’œuvre est qualifiée et les infrastructures logistiques déjà bien en place. Les exportateurs étrangers, confrontés aux surcoûts croissants de la guerre commerciale sino-américaine, pourraient voir dans le Maroc une plateforme d’exportation idéale vers le marché nord-américain. Le faible taux de 10 %, comparé aux 30 % imposés à l’Algérie voisine, pourrait devenir un véritable levier de compétitivité.

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Cependant, des voix s’élèvent pour nuancer cet optimisme. Certains analystes, comme Rachid Aourraz du MIPA, mettent en garde contre les effets indirects de la guerre commerciale mondiale. Car si le Maroc est relativement épargné par les droits de douane eux-mêmes, les turbulences économiques globales – notamment le risque de récession aux États-Unis – pourraient impacter les flux d’investissements étrangers et réduire la demande pour les exportations marocaines. Des projets pharaoniques comme celui de Gotion High Tech, visant à établir une giga-usine de batteries pour 6,5 milliards de dollars sur le sol marocain, pourraient attirer l’attention de l’administration américaine si celle-ci y perçoit un biais chinois, et donc stratégique.

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La dynamique actuelle, édictée par Trump, représente malgré tout une opportunité rare pour le Maroc de s’imposer comme un maillon central des chaînes d’approvisionnement mondiales remodelées par la géopolitique. Avec une politique commerciale habile et des incitations ciblées, le Royaume pourrait séduire des multinationales en quête d’un environnement stable, d’un accès simplifié au marché américain, et de coûts maîtrisés. Le défi sera de capitaliser rapidement sur cette brèche, sans susciter l’animosité de Washington ou éveiller les soupçons d’une trop grande proximité avec des partenaires comme Pékin.

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Dans cette redistribution des cartes imposée par Trump, et où le malheur de certains fait le bonheur des autres, le Maroc semble, pour une fois, bénéficier d’un alignement des planètes. Encore faut-il savoir en profiter avant que les vents ne tournent à nouveau.