Lors de son intervention télévisée diffusée hier soir sur l’ENTV, le président Tebboune n’a pas mâché ses mots en évoquant le dossier de l’industrie automobile en Algérie, et plus précisément la présence du constructeur français Renault. Dans une sortie à la fois stratégique et piquante, Tebboune a critiqué ouvertement les performances industrielles du groupe Renault, notamment en ce qui concerne le taux d’intégration locale, un indicateur clé pour évaluer la réelle implication des industriels étrangers dans le tissu économique national.
« Ils sont là depuis 7 ans et n’ont même pas atteint 5 % de taux d’intégration », a lancé Tebboune, visiblement agacé par ce qu’il considère comme un manque d’engagement concret de la part de Renault. Cette déclaration, sans ambages, traduit une volonté ferme de réorienter la politique industrielle du pays vers des partenariats plus efficaces, plus équilibrés et surtout plus bénéfiques pour l’économie nationale. En évoquant Renault à plusieurs reprises, Tebboune a ainsi souligné l’exemple d’un modèle de coopération économique qui, selon lui, n’a pas tenu ses promesses.
Le message est clair : l’Algérie de Tebboune ne veut plus de simples vitrines industrielles à faible valeur ajoutée. Si Renault veut poursuivre l’aventure sur le sol algérien, il lui faudra revoir sa copie, s’adapter aux exigences locales et participer plus activement à la structuration d’un écosystème industriel authentique. Tebboune a été ferme : Renault ne pourra revenir qu’à condition d’améliorer significativement son taux d’intégration. En d’autres termes, la porte n’est pas fermée, mais elle ne s’ouvrira que sous certaines conditions bien précises.
En parallèle, Tebboune a profité de cette tribune pour annoncer l’arrivée prochaine de « géants » dans le secteur de l’automobile. Des noms n’ont pas été cités, mais l’intention est limpide : il s’agit de susciter la concurrence, créer une dynamique nouvelle, et imposer des standards industriels qui serviront les intérêts de l’Algérie. Cette perspective est également un message adressé à Renault : dans la vision de Tebboune, l’Algérie ne se contentera plus d’un partenariat à sens unique. Renault, comme tout autre acteur économique, devra s’aligner sur les nouvelles attentes dictées par Tebboune.
Cette déclaration n’est pas anodine dans un contexte où les relations entre la France et l’Algérie sont souvent scrutées à la loupe. En s’adressant indirectement à un fleuron de l’industrie française, Tebboune envoie un signal politique autant qu’économique. Il insiste sur la souveraineté industrielle de l’Algérie, sur la nécessité de se libérer d’un modèle de dépendance qui, selon lui, n’a pas apporté les fruits escomptés. Tebboune, en citant Renault trois fois dans la même séquence, inscrit son discours dans une logique de rupture avec les pratiques du passé.
La pique du président Tebboune envers Renault pourrait aussi être interprétée comme une forme de pression diplomatique déguisée, un appel à la révision des accords économiques bilatéraux dans un esprit de partenariat équitable. Il ne s’agit plus d’attirer des constructeurs uniquement pour leur nom ou leur prestige, mais pour leur capacité réelle à transférer de la technologie, à créer de l’emploi qualifié, et à s’intégrer durablement dans le tissu local. À travers Renault, Tebboune cible en réalité une philosophie industrielle entière, qu’il juge dépassée ou inadaptée aux nouvelles ambitions algériennes.
Le ton utilisé par Tebboune, à la fois ferme et pragmatique, montre que l’Algérie entend désormais poser ses propres règles du jeu. Renault, pour espérer un retour, devra démontrer qu’elle peut jouer selon ces règles. Et pour Tebboune, il ne s’agit pas simplement d’un chantier industriel, mais d’un enjeu de souveraineté et de développement stratégique. Les prochains mois diront si Renault est prêt à relever le défi lancé par Tebboune.