L’affaire de l’influenceur algérien « Doualemn », de son vrai nom Boualem Naman, a connu un tournant décisif ce jeudi avec la décision du tribunal correctionnel de Montpellier. Condamné à cinq mois de prison avec sursis pour « provocation non suivie d’effet à commettre un crime ou un délit », il se retrouve au cœur d’une tempête politico-judiciaire qui dépasse largement le cadre de son audience. Sa vidéo, diffusée début janvier sur TikTok, avait immédiatement déclenché une onde de choc, notamment en raison des tensions diplomatiques récurrentes entre la France et l’Algérie. Le parquet avait requis une peine de six mois de prison avec sursis, mais la justice a finalement opté pour une sanction légèrement plus clémente.
Lors de son procès, la présidente du tribunal a estimé que l’appel à la violence était manifeste. « L’expression employée ne laissait aucune place à l’ambiguïté », a-t-elle martelé, en réponse aux arguments de la défense qui évoquait une exagération langagière. L’influenceur, âgé de 59 ans et suivi par près de 138 000 abonnés sur TikTok, a tenté de minimiser ses propos en les replaçant dans un contexte de « colère spontanée ». Une explication qui n’a pas suffi à convaincre les magistrats. Son avocat a immédiatement annoncé son intention de faire appel, espérant un allègement voire une annulation de la sanction.
Mais au-delà de la sentence pénale, c’est la situation administrative de Boualem Naman qui cristallise les tensions. Déjà sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), il avait été expulsé vers Alger le 9 janvier. Toutefois, les autorités algériennes avaient refusé son entrée sur le territoire, le renvoyant directement en France dans ce qui fut perçu comme un affront diplomatique par Paris. Une humiliation pour les services français qui se sont retrouvés contraints de relancer la procédure d’expulsion. Le tribunal administratif de Melun avait par la suite annulé son OQTF initiale, exigeant que la procédure soit reprise avec un débat contradictoire.
Mercredi, « Doualemn » s’est donc présenté devant la Commission d’expulsion (Comex) à Montpellier. Il a une nouvelle fois reconnu que ses propos étaient déplacés, tout en insistant sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’un appel explicite à la violence. « Je regrette mes mots, je me suis laissé emporter », a-t-il déclaré devant la commission. Son avocate, Marie David-Bellouard, a dénoncé un dossier qu’elle juge monté de toutes pièces. « C’est une manœuvre politique destinée à masquer un agenda gouvernemental bien plus large », a-t-elle affirmé. La Comex rendra son avis le 12 mars, une date attendue avec fébrilité par les proches de l’influenceur.
L’affaire « Doualemn » ne fait que s’ajouter à une série de condamnations visant des influenceurs algériens présents en France. Outre Boualem Naman, d’autres créateurs de contenu ont récemment fait l’objet de poursuites judiciaires pour des discours jugés haineux ou incitatifs à la violence. « Imad Tintin », un autre influenceur algérien, devait être jugé mercredi à Grenoble pour « provocation au terrorisme » après avoir tenu des propos controversés sur TikTok. Son procès a été renvoyé au 23 mai afin qu’une expertise linguistique puisse être menée sur la traduction de ses vidéos.
De son côté, Youcef A., connu sous le pseudonyme « Zazou Youssef », a écopé d’une peine bien plus lourde. Condamné fin février à Brest à 18 mois de prison ferme assortis d’une interdiction du territoire français de dix ans, il avait, selon les juges, appelé à commettre des attentats sur le sol français et incité à des violences en Algérie. Une condamnation exemplaire destinée à marquer une ligne rouge face aux dérapages des influenceurs qui utilisent les réseaux sociaux pour diffuser des contenus extrêmes.
Enfin, la Franco-algérienne Sofia Benlemmane, également très suivie sur TikTok, sera jugée le 18 mars à Lyon pour une vidéo où elle insultait violemment une autre femme, ponctuant son discours d’une attaque explicite contre la France. Autant d’affaires qui illustrent la vigilance croissante des autorités face aux discours haineux en ligne et qui témoignent d’une volonté ferme de réguler les contenus des influenceurs à la dérive.
L’affaire « Doualemn » s’inscrit donc dans un contexte de tension entre les gouvernements français et algérien, sur fond de gestion des flux migratoires et de lutte contre les discours incitant à la violence. Alors que son sort judiciaire est encore suspendu à un éventuel appel, son avenir en France semble plus que jamais incertain. La décision de la Commission d’expulsion, attendue le 12 mars, pourrait sceller définitivement son destin sur le sol français. En attendant, la polémique ne faiblit pas, alimentée par les débats sur la liberté d’expression, les responsabilités des influenceurs et les relations diplomatiques toujours sensibles entre Alger et Paris.
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