En France, un vent de changement pourrait bientôt souffler sur le quotidien des salariés, en particulier celui des travailleurs algériens. Le député Jean Laussucq, affilié au groupe Ensemble pour la République, a récemment déposé une proposition de loi qui vise à bouleverser une règle vieille de plus de 40 ans : la mensualisation du salaire. Cette réforme, qui permettrait aux employés de percevoir leur rémunération en plusieurs versements par mois, fait déjà couler beaucoup d’encre. Pour les salariés algériens, nombreux à occuper des emplois précaires ou à horaires irréguliers, cette mesure pourrait représenter une bouffée d’oxygène dans un contexte économique tendu.
Depuis 1978, le Code du travail impose une règle claire : le salaire doit être versé une fois par mois, avec la possibilité d’un seul acompte, versé autour du 15, et plafonné à 50 % de la paie. Ce système, conçu à une époque où les conditions économiques et sociales étaient très différentes, ne répond plus aux besoins actuels de nombreux salariés. Avec l’inflation, la hausse des loyers, des dépenses énergétiques et alimentaires, de plus en plus de travailleurs peinent à joindre les deux bouts entre deux paies. Selon un sondage OpinionWay réalisé pour Le Parisien, pas moins de 63 % des salariés français se disent favorables à un versement plus fréquent de leur salaire.
C’est dans ce contexte que Jean Laussucq veut introduire un nouveau droit : celui de demander à l’employeur un fractionnement du versement du salaire. Autrement dit, un salarié pourrait choisir de recevoir une partie de son salaire chaque semaine ou tous les dix jours, selon ses besoins. Ce ne serait pas une contrainte imposée aux entreprises, mais bien un droit offert au salarié, activable à sa demande. Une mesure simple, mais potentiellement révolutionnaire.
« Les Français paient plus de 7 milliards d’euros par an en frais bancaires, souvent liés à des découverts. Ce sont des charges qui pèsent surtout sur les plus modestes », explique le député. Il ajoute : « À l’inverse, on a une situation très rigide, qui était protectrice il y a 50 ans, avec un acompte sur salaire possible seulement une fois par mois, le 15 du mois, pour la moitié du salaire ». Ce décalage entre les besoins modernes et la rigidité administrative est au cœur de sa proposition.
Ce changement pourrait être particulièrement bénéfique pour les salariés algériens en France. Installés en grand nombre dans l’Hexagone, ils sont souvent employés dans des secteurs à forte instabilité : BTP, restauration, sécurité, livraison ou encore nettoyage. Dans ces métiers, où les heures supplémentaires varient selon les périodes et les besoins des employeurs, la possibilité de percevoir son salaire en plusieurs fois apporterait une sécurité financière immédiate. Elle permettrait également d’éviter les prêts à la consommation ou le recours aux aides sociales pour gérer les dépenses imprévues.
Cette proposition de loi, bien qu’encore au stade du débat, remet donc en question une norme profondément ancrée. Elle pose aussi une question plus large : comment adapter le droit du travail aux réalités économiques actuelles ? Dans une société où la précarité gagne du terrain, une telle mesure pourrait redonner du pouvoir aux salariés, en leur offrant plus de souplesse dans la gestion de leurs finances.
Reste à savoir si le Parlement suivra cette initiative. Le texte sera examiné dans les prochains mois. Si la mesure est adoptée, elle marquera une évolution notable des droits des salariés en France, en particulier pour les travailleurs issus de l’immigration, souvent en première ligne face à l’instabilité financière. En attendant, les regards sont tournés vers l’Assemblée nationale, où cette idée, simple en apparence, pourrait bien transformer la vie de milliers de travailleurs.