L’accord franco-algérien signé en 1968, qui régit la circulation, l’emploi et le séjour des ressortissants algériens en France, est au cœur de nombreux débats depuis des années. Souvent évoqué dans les discussions politiques, particulièrement à droite, cet accord semble faire l’objet d’une remise en question croissante. Loin de se limiter à une simple formalité diplomatique, il représente un élément majeur de la relation entre les deux pays, mais aussi un sujet complexe pour les ressortissants algériens résidant en France.
À l’origine, cet accord visait à régir les modalités de séjour des Algériens en France, dans un cadre de coopération post-coloniale, après la guerre d’indépendance de l’Algérie. Cependant, avec le temps et les évolutions législatives, notamment les avenants de 1985, 1994 et 2001, cet accord a perdu une grande partie de son impact et de ses avantages pour les ressortissants algériens. En effet, ces modifications successives ont largement limité les droits qu’ils détenaient initialement, et certains aspects de l’accord ont même fini par devenir contre-productifs.
L’un des points majeurs soulevés par les critiques de l’accord est qu’il n’accorde plus les avantages qu’il était censé offrir aux Algériens, notamment en matière d’immigration et de régularisation. À partir de 1985, les Algériens doivent demander une autorisation de travail pour pouvoir exercer une activité professionnelle en France. Cette obligation est venue compliquer les démarches administratives pour de nombreux ressortissants algériens, rendant leur insertion dans la société française encore plus difficile. De plus, l’accord a introduit l’obligation de recueillir une autorisation préalable pour le regroupement familial, ce qui a restreint l’accès à la réunification familiale pour de nombreuses familles algériennes établies en France.
L’avocat Morade Zouine, spécialiste du droit des étrangers et de la nationalité, rappelle au média français Libération que malgré les modifications successives de l’accord, des spécificités persistent pour les ressortissants algériens. Toutefois, ces spécificités ne sont pas toujours favorables. Dans certaines situations, elles semblent même désavantager les Algériens par rapport à d’autres étrangers en France. Par exemple, les Algériens ne bénéficient pas des avancées récentes en matière de régularisation. En effet, contrairement à d’autres ressortissants étrangers, les Algériens ne peuvent pas accéder aux cartes pluriannuelles de séjour ni aux cartes « talents », qui offrent une plus grande stabilité et une simplification des démarches administratives.
Au-delà des questions juridiques et administratives, l’accord de 1968 et ses avenants soulèvent des problématiques d’ordre symbolique et politique. Depuis quelques années, certains partis politiques, notamment ceux de droite, plaident pour une révision ou même une rupture de cet accord, arguant qu’il constitue un privilège injustifié pour les ressortissants algériens. Cette position reflète une vision de plus en plus strictes de l’immigration et de l’intégration en France, et pourrait avoir des répercussions sur les conditions de vie des Algériens en France.
Malgré tout, il convient de souligner que cet accord, bien que critiqué, a aussi permis de maintenir une forme de lien particulier entre la France et l’Algérie, notamment pour les Algériens ayant des attaches familiales ou professionnelles dans l’Hexagone. Néanmoins, la révision de l’accord de 1968 semble inévitable, surtout au regard des évolutions législatives européennes et françaises qui visent à harmoniser les droits des étrangers sur tout le territoire de l’Union européenne. La question demeure donc de savoir si cette révision serait bénéfique ou défavorable pour les ressortissants algériens, et dans quelle mesure elle pourrait affecter la relation bilatérale entre les deux pays.
Ainsi, l’accord de 1968, loin de constituer un avantage indiscutable pour les Algériens en France, reflète les tensions et les évolutions des relations entre les deux pays. Alors que certains de ses aspects ne sont plus à jour avec les normes européennes actuelles, sa remise en question pourrait avoir des conséquences profondes, tant pour les Algériens résidant en France que pour la diplomatie entre les deux nations.
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