La France pourrait « imposer aux retraités algériens de résider dans la métropole »

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La pension des retraités algériens en France est devenue un droit sous pression dans un contexte tendu des relations algéro-françaises. En 2025, pas moins de 50.000 retraités algériens sont appelés à justifier de leur existence par les caisses de retraite françaises. Cette opération s’inscrit dans une vaste campagne de contrôle des pensions versées à l’étranger, comme le mentionne un rapport de la Cour des comptes française daté du 26 mai.

Ce dispositif vise clairement les retraités algériens vivant en Algérie, dans un contexte où la relation entre la France et l’Algérie se crispe sur plusieurs fronts. D’ici 2026, ce chiffre atteindra 60.000 par an, permettant de couvrir l’ensemble des retraités algériens sur une période de six années. Or, ce contrôle massif ne semble pas s’appliquer de manière égale à tous les pays. Par exemple, seules 8.000 convocations annuelles sont prévues pour les Marocains, 2.000 pour les Tunisiens et 800 pour les ressortissants turcs. Cette différence de traitement soulève des interrogations légitimes sur la manière dont les retraités algériens sont ciblés, et sur les conséquences que cela implique.

En cas de non-réponse ou d’impossibilité de produire un certificat de vie, les pensions sont suspendues. D’après les mêmes sources, 15.000 retraités algériens sont menacés de suspension de pension dès 2025, ce qui représenterait 88% des 17.000 cas de suspension anticipés pour les pensionnés résidant hors de France. Face à cette situation, des voix s’élèvent pour alerter sur une politique jugée injuste à l’encontre des retraités algériens. Omar Hetatache, docteur en droit et enseignant à l’Université de M’sila, estime que ces mesures posent de nombreuses questions juridiques et sociales. Il déclare dans un entretien accordé au quotidien Horizons : « Ces relations sont particulières, en raison de l’Histoire commune, l’Algérie ayant été un département français jusqu’à son indépendance en 1962. Cette indépendance ne s’est pas faite par une simple décision, mais suite à une guerre, une victoire et des négociations. »

Les retraités algériens ont longtemps bénéficié de droits garantis par des accords bilatéraux conclus dans les années 1960 à 1980, accords qui couvrent le travail, la mobilité, la retraite et la protection sociale. Omar Hetatache précise : « Ces négociations ont abouti à un ensemble d’accords, notamment ceux garantissant les droits des Algériens à la mobilité, au travail, et ceux des Français résidents en Algérie. Il y avait donc des engagements mutuels entre les 2 États. » Il souligne par ailleurs l’importance de la diaspora : « L’Algérie compte une importante communauté en France, probablement la plus grande des pays du Maghreb. (…) On parle aujourd’hui de 7 à 10 millions d’Algériens ou Algéro-Français, dont une majorité sont ou étaient des travailleurs. »

La France pourrait imposer aux retraités algériens de résider dans la métropole pour maintenir leurs droits, une hypothèse évoquée à demi-mot et qui inquiète. Pourtant, Omar Hetatache rappelle : « La retraite est un droit fondamental pour tout travailleur. (…) Juridiquement, la France peut revoir ses textes, mais elle ne peut pas priver les retraités algériens de leur droit à la pension. Elle n’a pas non plus le droit de faire une discrimination entre les retraités algériens et les autres travailleurs. Il ne peut y avoir de distinction entre des droits déjà octroyés. Ces droits sont garantis par les accords bilatéraux entre les 2 pays. »

Concernant les pratiques de vérification, il reconnaît leur légitimité dans la lutte contre la fraude : « Le fait que la France vérifie si 100.000 retraités algériens sont toujours en vie relève d’une procédure normale (…) Une telle fraude n’est tolérée ni par le droit algérien ni par le droit français. » Mais il alerte sur d’éventuelles dérives : « Certaines pratiques pourraient restreindre les droits de certains retraités en leur imposant de résider en France pour bénéficier de leur pension. Cela va à l’encontre des principes constitutionnels, des droits humains, notamment celui de circuler librement et de choisir son lieu de résidence. »

Omar Hetatache précise enfin les recours possibles pour les retraités algériens. Il explique que le droit français autorise les contestations à travers des procédures administratives ou judiciaires : « Le droit permet au retraité d’introduire un recours administratif auprès de la caisse de retraite, dans un délai précis (…) En cas de réponse défavorable, le retraité peut saisir la justice. » Il met cependant en garde contre « le coût élevé des démarches judiciaires en France, notamment les honoraires d’avocats », qui pourraient dissuader les plus vulnérables.

La France pourrait imposer aux retraités algériens de résider dans la métropole, mais cela risquerait d’enfreindre les accords bilatéraux, d’attiser les tensions sociales et de soulever une avalanche de contentieux. La France pourrait imposer aux retraités algériens de résider dans la métropole, mais toute mesure arbitraire entraînerait inévitablement des effets contraires à ceux recherchés.