Chaque année, environ 10 milliards de dollars sont envoyés au Maroc par les Marocains résidant à l’étranger (MRE). Ces transferts, représentant près de 8 % du produit intérieur brut (PIB) du Royaume, constituent une source cruciale de devises pour l’économie marocaine. Une grande partie de ces fonds provient des pays européens où la diaspora marocaine est fortement implantée. Cependant, une nouvelle directive de l’Union européenne pourrait bouleverser cet équilibre financier et menacer la continuité de ces flux monétaires essentiels.
La directive envisagée par l’Union européenne impose des contraintes supplémentaires aux banques étrangères opérant sur son territoire. Si elle entre en vigueur, cette mesure obligerait les banques marocaines à établir des succursales physiques dans les pays européens où elles opèrent. Actuellement, les banques marocaines sont présentes dans 27 pays européens mais ne disposent de filiales et succursales qu’en France, en Espagne, en Italie, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et au Royaume-Uni. Cette couverture limitée pourrait rendre les transferts de fonds plus coûteux et, dans certains cas, carrément impossibles pour une grande partie de la diaspora marocaine.
Selon le média Bladi, cette situation pourrait s’aggraver si les banques européennes décidaient de suspendre les activités des filiales étrangères servant d’intermédiaires pour les transferts d’argent entre les maisons mères marocaines et les membres de la diaspora. En effet, certaines autorités bancaires européennes estiment que les banques étrangères doivent impérativement créer de la valeur sur le sol européen avant de rapatrier les fonds vers leurs pays d’origine. Une telle restriction porterait un coup sévère aux membres de la diaspora, qui utilisent ces canaux pour soutenir leurs familles et investir dans leur pays natal.
Le Maroc, conscient de l’importance stratégique de ces transferts de fonds, a longtemps mis en place des mesures incitatives pour faciliter ces opérations. La Banque Centrale marocaine a diversifié les canaux de transmission et réduit les coûts des transactions afin de maximiser les apports financiers des MRE. Ces efforts ont permis de renforcer le rôle des transferts de fonds dans l’économie nationale, mais la directive européenne pourrait remettre en question cet équilibre.
Face à cette menace imminente, les autorités marocaines tentent de désamorcer la situation par des négociations avec les partenaires européens. Abdellatif Jouahri, gouverneur de la Banque Centrale du Maroc, a indiqué que des discussions ont été entamées avec des pays comme la France et l’Espagne, deux nations où la diaspora marocaine est fortement représentée. L’objectif est de trouver un terrain d’entente pour préserver les canaux de transfert existants tout en respectant les exigences réglementaires européennes. Ces discussions devraient s’élargir à d’autres membres de l’Union européenne dans les semaines à venir.
Le projet de directive européenne, s’il est adopté dans sa version actuelle, pourrait représenter un défi de taille pour les MRE et l’économie marocaine dans son ensemble. En plus de compliquer les transferts de fonds, cette mesure pourrait également affecter la relation de confiance entre la diaspora marocaine et les banques de leur pays d’origine. Pour de nombreux MRE, envoyer de l’argent au Maroc est non seulement une question de soutien familial mais aussi un moyen de maintenir un lien fort avec leur pays natal. Toute entrave à cette connexion risquerait de générer un sentiment de frustration au sein de la diaspora.
Le Maroc se retrouve ainsi à un carrefour délicat où il doit jongler entre la protection des intérêts de ses citoyens à l’étranger et le respect des réglementations imposées par ses partenaires européens. Les transferts des MRE ont longtemps été un pilier de l’économie marocaine, et les efforts pour les sécuriser reflètent l’importance de cette ressource pour le Royaume. Les prochains mois seront décisifs pour déterminer si les discussions en cours aboutiront à un compromis acceptable pour toutes les parties impliquées.
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