La visite du président algérien Abdelmadjid Tebboune en France, qui devait avoir lieu début octobre 2024, a été annulée. Lors d’un entretien à la télévision, Tebboune a déclaré, avec une fermeté notable, qu’il « n’ira pas à Canossa », signifiant ainsi qu’il ne serait pas enclin à se plier aux exigences ou aux attentes françaises dans le contexte actuel. Cette annonce n’est pas surprenante, compte tenu des relations tendues entre l’Algérie et la France, exacerbées par le soutien récent de Paris au plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental, un territoire disputé.
Les tensions entre les deux pays ont atteint un nouveau sommet à la fin juillet 2023, lorsque le gouvernement français a exprimé son soutien à la proposition marocaine concernant le statut de ce territoire. En réponse, l’Algérie a rapidement retiré son ambassadeur de Paris et a réduit sa représentation diplomatique, ne conservant qu’un chargé d’affaires. Cette réaction forte illustre la fragilité des relations bilatérales, qui demeurent marquées par l’ombre du passé colonial et par des différends contemporains.
Dans son discours, le président Tebboune n’a pas hésité à évoquer les blessures profondes laissées par la colonisation française, qui a duré de 1830 à 1962. Il a décrit ce qu’il considère comme un « génocide », arguant que la population algérienne, qui comptait environ quatre millions d’habitants avant la colonisation, n’était plus que de neuf millions après 132 ans de domination. Cette assertion souligne l’importance de la mémoire collective en Algérie, qui continue d’influencer la politique actuelle.
Le président algérien a également critiqué une « minorité haineuse » en France, qu’il accuse d’entraver les efforts pour une réconciliation sur le plan mémoriel. Il a insisté sur le fait que l’Algérie demande la vérité historique concernant les atrocités commises pendant la période coloniale. Ce discours montre une volonté de confronter les narrations historiques, d’autant plus que des questions mémorielles continuent de diviser les deux pays.
Les essais nucléaires français en Algérie entre 1960 et 1966 ont également été un sujet de tension. Tebboune a exhorté la France à « nettoyer les sites des essais nucléaires », soulignant que des documents déclassifiés avaient révélé des retombées radioactives persistantes. Les conséquences de ces essais sont un sujet de préoccupation non seulement pour l’Algérie, mais aussi pour les pays voisins, affectés par la pollution radioactive.
Le président algérien a aussi fait référence à l’accord franco-algérien de 1968, qui confère aux Algériens un statut particulier en matière de droits de circulation et d’emploi en France. Cet accord, qui a été signé à une époque où la France avait besoin de main-d’œuvre, est aujourd’hui considéré par Tebboune comme un « étendard derrière lequel marche l’armée des extrémistes » de droite en France, qui cherchent à le remettre en cause. Ce climat de tension autour des droits des immigrés algériens en France reflète un sentiment plus large de rejet envers les populations d’origine maghrébine dans le contexte politique actuel en France.
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Au final, l’annulation de la visite de Tebboune en France marque une nouvelle phase dans les relations déjà tumultueuses entre les deux nations. La question des mémoires partagées, des droits des Algériens en France et des conséquences des actions passées continue de hanter les échanges diplomatiques. Alors que les dirigeants des deux pays semblent figés dans leurs positions, la possibilité d’une réconciliation semble lointaine. Le futur des relations franco-algériennes dépendra de la capacité des deux nations à naviguer dans les eaux troubles de leur histoire commune tout en établissant un dialogue constructif pour l’avenir.