Titre de séjour : une nouvelle mesure, qui fait jaser, ne s’applique pas aux Algériens (pour le moment)

Mari titre de séjour OQTF

Une nouvelle réforme concernant le titre de séjour en France suscite un vif débat. En effet, la loi sur l’immigration, adoptée récemment, introduit une obligation inédite : un test de français écrit pour toute personne souhaitant obtenir ou renouveler un titre de séjour de longue durée. Cette mesure, prévue pour entrer en vigueur d’ici juillet 2025, inquiète de nombreux ressortissants étrangers, qui craignent une exclusion administrative due à des critères linguistiques jugés trop stricts.

Cependant, une particularité notable émerge : les Algériens ne seront pas concernés par cette obligation, du moins pour le moment. Cette exception est liée à l’accord franco-algérien de 1968, qui régit le régime spécifique de séjour des Algériens en France. Mais pour combien de temps encore ?

Une mesure qui inquiète les communautés immigrées

Le gouvernement justifie cette réforme par un objectif d’intégration : exiger un niveau A2 (niveau collège) pour un titre de séjour temporaire, un niveau B1 (niveau lycée) pour une carte de résident de 10 ans, et un niveau B2 (universitaire) pour la naturalisation. L’intention affichée est de favoriser la maîtrise de la langue française afin de faciliter l’insertion sociale et professionnelle des immigrés.

Cependant, cette mesure est vivement critiquée par les associations de défense des droits des étrangers. Elles pointent du doigt une exigence disproportionnée, notamment pour les populations peu scolarisées ou issues de pays où le français n’est pas la langue principale. Le délégué général de l’école Thot pour réfugiés a dénoncé une « barrière rédhibitoire » qui risque de plonger des milliers de personnes dans la précarité.

En effet, le ministère de l’Intérieur estime que cette mesure pourrait conduire à l’expulsion de près de 20 000 étrangers en situation régulière et empêcher 40 000 autres d’obtenir une carte de résidence. Une étude récente a démontré que même parmi les Français de naissance, une partie significative de la population aurait des difficultés à réussir ces tests.

L’exception algérienne : une immunité temporaire ?

Les Algériens échappent à cette règle grâce à l’accord franco-algérien de 1968, qui prévoit des dispositions spécifiques en matière de séjour et de travail. Cet accord permet notamment aux Algériens de bénéficier d’une carte de résident de 10 ans sous des conditions moins strictes que celles imposées aux autres ressortissants non-européens.

Toutefois, ce statut particulier est régulièrement remis en question par une partie de la classe politique française, qui milite pour son alignement sur le droit commun. À plusieurs reprises, des débats ont émergé autour d’une possible révision de cet accord, notamment en période de tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie. Si la pression politique augmente, il n’est pas exclu que les Algériens soient également soumis à ces nouvelles exigences linguistiques dans un avenir proche.

Une logique de sélection et d’exclusion ?

Derrière l’argument de l’intégration se cache une stratégie politique visant à durcir les conditions de séjour. En liant le droit de résider en France à la maîtrise du français, le gouvernement met en place un filtre qui pourrait réduire le nombre d’étrangers en situation régulière.

Par ailleurs, cette mesure pose la question de l’égalité des chances. Si l’apprentissage du français est essentiel pour l’insertion sociale et professionnelle, encore faut-il donner aux migrants les moyens de l’acquérir. Or, les cours de français sont souvent coûteux, peu accessibles et soumis à de longues listes d’attente.

En réalité, cette réforme pourrait fragiliser encore davantage les populations déjà précaires. Nombre d’entre elles travaillent dans des secteurs essentiels mais peu qualifiés (restauration, bâtiment, soins à la personne), où la maîtrise de l’écrit n’est pas un prérequis. Pour ces travailleurs, une telle obligation pourrait signifier une expulsion, une perte d’emploi et une rupture familiale.

Une affaire à suivre

Alors que la mise en application de cette mesure est prévue pour juillet 2025, les associations de défense des droits des étrangers et certains parlementaires promettent d’ores et déjà de contester cette réforme devant le Conseil constitutionnel. Plusieurs experts juridiques estiment que la disposition pourrait être jugée discriminatoire, notamment parce qu’elle ne concerne pas les ressortissants de l’Union européenne.

Quant aux Algériens, ils bénéficient encore d’une protection temporaire grâce à leur statut particulier. Mais dans un contexte où le climat politique tend à durcir les lois sur l’immigration, leur situation pourrait évoluer. L’accord franco-algérien de 1968 est régulièrement remis en question, et une pression politique accrue pourrait conduire à une harmonisation des règles.

D’ici là, cette réforme continue de susciter de vifs débats et divise la société française. Entre volonté d’intégration et logique de restriction migratoire, elle soulève une question fondamentale : l’apprentissage d’une langue doit-il être une condition pour vivre dans un pays, ou un droit accompagné des moyens nécessaires pour y parvenir ?

Lire également :

Aéroport de Paris Roissy : un pilote Air Algérie fait « sa spéciale » en plein vol

Voyage : l’aéroport d’Alger met le paquet pour des « effaroucheurs »

« 474.300 euros » : une nouvelle affaire ébranle le marché noir