En ce premier jour de l’Aïd el-Fitr 2025, le marché noir des devises en Algérie enregistre une baisse de l’euro face au dinar algérien. Cette fluctuation, bien que légère, attire l’attention des observateurs et des cambistes qui scrutent l’évolution des taux de change dans le contexte des fêtes religieuses et des mouvements financiers qui les accompagnent.
La veille, soit le 30 mars 2025, l’euro s’échangeait à 251 dinars à l’achat et 253 dinars à la vente. Aujourd’hui, il accuse une baisse, passant à 250 dinars à l’achat et 252 dinars à la vente. Une variation qui, bien qu’étroite, traduit un léger repli de la monnaie européenne face au dinar, sans pour autant annoncer un renversement majeur de tendance.
Le dollar américain n’est pas en reste et enregistre également une baisse. Son taux de change est actuellement fixé à 235 dinars à l’achat et 238 dinars à la vente. Une diminution qui pourrait s’expliquer par la faiblesse de la demande en cette période fériée. Quant à la livre sterling, bien qu’elle connaisse également un recul, elle demeure parmi les monnaies fortes sur le marché noir, avec un taux d’achat à 294 dinars et un taux de vente à 297 dinars. En revanche, le dollar canadien fait preuve d’une certaine stabilité, continuant de s’échanger à 158 dinars à l’achat et 162 dinars à la vente, sans fluctuation notable.
Sur le marché officiel, régulièrement mis à jour par la Banque d’Algérie, les taux sont bien différents. L’euro s’y affiche à 144,34 dinars, le dollar à 133,73 dinars, la livre sterling à 173,16 dinars et le dollar canadien à 93,46 dinars. Cette écoute entre les valeurs officielles et celles du marché noir reflète la présence d’une forte demande sur le circuit informel, alimentée par les restrictions d’accès aux devises à travers les circuits bancaires classiques.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces mouvements de change. Tout d’abord, l’effet saisonnier de l’Aïd el-Fitr joue un rôle non négligeable. Beaucoup d’Algériens de l’étranger envoient des fonds à leurs familles pour célébrer la fête, ce qui influence la demande en devises. Par ailleurs, la réduction des activités économiques et le ralentissement des transactions commerciales pendant cette période peuvent temporairement modifier les dynamiques du marché noir.
L’avenir des taux de change reste incertain, et les cambistes du square Port-Saïd à Alger, tout comme ceux des autres grandes villes du pays, surveillent de près les évolutions à venir. Si la tendance actuelle semble marquer une légère dépréciation des devises face au dinar, il est difficile de prédire si cette situation se prolongera ou si elle sera rapidement corrigée par une reprise haussière, en fonction de la demande post-fête et des mouvements économiques plus globaux.
Marché noir des devises : quel sera l’impact de la nouvelle allocation touristique ?
L’allocation touristique de 750 euros, attendue par des milliers d’Algériens, fait couler beaucoup d’encre. Annoncée par le ministre des Finances Abdelkrim Bouzerd lors de son déplacement à Tlemcen, cette mesure est perçue comme une avancée majeure pour les voyageurs, mais aussi comme un test grandeur nature pour l’économie informelle du pays. Prévues pour être effectives une à deux semaines après l’Aïd el-Fitr, ces allocations devraient bouleverser, ou du moins secouer, l’écosystème bien huilé du marché noir des devises, dominé par le célèbre square Port-Saïd à Alger.
Depuis l’annonce officielle en décembre 2024, le marché parallèle n’a pas bronché. Une stabilité surprenante qui interroge. L’ombre du square Port-Saïd plane toujours sur les transactions en devises, et les taux n’ont pas connu la secousse attendue. Pour Mahfoud Kaoubi, expert en finances et analyste économique, la raison est simple : cette allocation soulage les voyageurs occasionnels, mais n’impacte pas l’ensemble des acteurs du marché informel. « Les chefs d’entreprise et les importateurs continueront à se tourner vers le circuit parallèle pour leurs besoins en devises. Le système bancaire algérien est encore trop rigide pour offrir une alternative viable », souligne-t-il, dans un entretien accordé à Horizons.
En effet, au-delà des simples touristes, de nombreux professionnels dépendent de ce marché pour acquérir des pièces détachées, des équipements et d’autres biens introuvables dans le circuit officiel. La bureaucratie contraignante et les restrictions de change poussent ainsi les opérateurs économiques à contourner le système bancaire classique, alimentant un cercle vicieux où le marché noir reste le refuge des transactions en devises.
Le coût de cette allocation touristique s’élève à près de 4 milliards de dollars par an, un montant colossal pour un pays dont les réserves de change restent sous pression, d’autant plus que le prix du pétrole peine à franchir la barre des 70 dollars le baril. Cette injection massive de devises dans l’économie pose une question cruciale : est-ce un pari risqué ou une première étape vers une réforme plus profonde du marché des changes ?
Mahfoud Kaoubi propose une approche plus globale. « Ce n’est pas en distribuant 750 euros une fois par an qu’on réglera le problème du marché informel. Il faut une offre concurrentielle et régulière, avec des bureaux de change accessibles et une flexibilité accrue du système bancaire. Tant que cette alternative n’existe pas, le square Port-Saïd restera le centre névralgique des échanges de devises en Algérie », affirme-t-il.
L’idée d’un taux de change à deux niveaux refait aussi surface. Une solution qui permettrait aux particuliers et aux entreprises d’accéder à des devises à des taux plus compétitifs, tout en captant une partie des flux aujourd’hui monopolisés par le marché noir. Mais encore faut-il que la confiance des Algériens dans le système bancaire soit restaurée, un défi de taille après des décennies de restrictions et d’inefficacité institutionnelle.
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