Actualités – Deux sœurs algériennes ont été jugées au tribunal de Lille le 17 octobre pour une fraude ayant permis d’obtenir illégalement près de 400 000 euros de fonds publics du Département du Nord, en France. Ces fonds étaient destinés à rémunérer des aidants pour prendre soin de leur frère malade, bien qu’il fût décédé depuis quatre ans.
L’ampleur de cette fraude est telle qu’elle pourrait laisser penser à une organisation criminelle bien rodée, mais ce n’est pas le cas. C’est plutôt une grand-mère qui comparaît devant le tribunal de Lille pour cette escroquerie. Elle est jugée aux côtés de sa sœur pour avoir perçu illégalement 389 000 euros de la part du Département du Nord, sous forme de chèques emploi service, entre 2014 et 2018, alors qu’elles résidaient à Haubourdin.
Pour perpétrer cette fraude, les deux sœurs ont prétendu que leur frère malade, bénéficiaire des chèques emploi service, était toujours en vie. La supercherie a été découverte quatre ans après le décès de leur frère, originaire d‘Algérie.
Les deux sœurs ont pris des mesures pour ne pas éveiller les soupçons, notamment en maintenant le bail du défunt, en continuant de payer le loyer, en maintenant son abonnement Internet et sa ligne téléphonique.
Samira, âgée de 71 ans, rejette la faute sur sa sœur cadette, l’accusant de l’avoir contrainte à signer les documents affirmant que cinq aidants prenaient soin de leur frère malade. Ces soi-disant aidants n’ont jamais existé, car le frère était décédé, mais ils ont bel et bien été rémunérés grâce à des fonds publics. La cadette, Yasmine, âgée de 59 ans, n’est pas présente au procès pour des raisons de santé, selon son avocat.
Les deux sœurs ont été les cotutrices de leur frère de 2011 à 2014. Après le décès de ce dernier en décembre 2015, Yasmine a mis fin à sa tutelle, tandis que Samira est restée impliquée. Cependant, les deux sœurs, ainsi que leur mère, ont continué à bénéficier de l’argent versé par le Département les années suivantes. Samira tente de minimiser sa participation en déclarant qu’elle n’était pas seule dans cette affaire.
Les sommes perçues étaient diverses, allant de 360 € pour Yasmine à 500 € pour Samira, versées à quelques mois d’intervalle. Les paiements mensuels pouvaient atteindre jusqu’à 6 000 € lorsqu’il s’agissait d’acquisition de matériel médical, par exemple.
Interrogée, Samira tente de se décharger de toute responsabilité en affirmant que sa mère et sa sœur remplissaient les documents pour obtenir les chèques emploi service. Elle prétend même que parfois, l’une ou l’autre d’entre elles imitait sa signature. Après le décès de leur frère, elle n’a pas eu le courage d’arrêter la fraude. Elle essaie de minimiser son implication en déclarant qu’elle n’était pas la seule impliquée.
La fraude a pris fin en 2018 après le décès de la mère des deux sœurs. Le Département a découvert la supercherie et a demandé le remboursement des fonds. Depuis 2020, Samira restitue progressivement l’argent qu’elle a indûment perçu, remboursant un peu plus de 6 600 €. L’avocat du Département du Nord réclame le remboursement des 382 000 € restants et demande que chaque sœur paie 1 500 € de plus pour le temps perdu par les employés de la collectivité.
L’avocat général, quant à lui, considère que ces actes sont graves et portent atteinte à la solidarité nationale. Il requiert 10 mois de prison avec sursis pour Samira et 5 mois de prison avec sursis pour Yasmine, en tenant compte du fait que cette dernière a cessé sa tutelle dès 2015, contrairement à sa sœur aînée qui ne l’a fait qu’en 2018. Il demande également que les deux sœurs remboursent intégralement les fonds détournés. La décision du tribunal sera rendue le 7 novembre prochain.
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