Un nouveau revers stratégique vient s’ajouter à la liste des marchés que la France perd progressivement en Algérie. Ce dimanche, l’Entreprise Nationale de Tubes et Transformation de Produits Plats (ANABIB), filiale du holding industriel SNS, a signé un accord de partenariat avec la société chinoise Dauphine d’Or, selon un communiqué émanant du ministère de l’Industrie. Une évolution significative dans les relations économiques de l’Algérie, marquant un basculement vers de nouveaux partenaires et affaiblissant encore davantage l’influence française dans des secteurs traditionnellement dominés par des entreprises hexagonales.
La cérémonie de signature s’est déroulée au siège du ministère de l’Industrie, sous la supervision du ministre Sifi Ghrieb, en présence du président-directeur général de la holding SNS et de plusieurs cadres du ministère. Ce partenariat porte sur des secteurs industriels de haute valeur : la fabrication de moules, de supports métalliques, ainsi que la galvanisation par immersion, un procédé essentiel pour protéger les matériaux contre la corrosion.
L’accord stipule la création d’un Groupement d’Intérêt Commun (GIC), destiné à unir les ressources, les compétences et les capacités de production des deux entités afin d’améliorer leur compétitivité et de mieux répondre aux exigences du marché. Cet effort de mutualisation vise à renforcer la souveraineté industrielle de l’Algérie tout en lui permettant de moderniser ses infrastructures de production grâce à l’expertise technologique apportée par la partie chinoise.
Ce partenariat s’inscrit dans la stratégie globale adoptée par le ministère de l’Industrie algérien, qui entend localiser en Algérie les industries jugées stratégiques. L’objectif affiché est de réduire la dépendance aux importations, de dynamiser le tissu industriel national et de favoriser la montée en gamme des produits algériens dans plusieurs filières, notamment la fabrication de moules divers, de supports métalliques spécialisés, et la galvanisation par chaleur ou immersion.
Historiquement, ce type de marché aurait été conquis par des groupes français, dans la continuité d’une relation économique nourrie depuis plusieurs décennies entre la France et l’Algérie. Mais la dynamique a changé. Le contexte actuel, marqué par une dégradation notable des relations politiques entre la France et l’Algérie, a entraîné un redéploiement des choix économiques de l’Algérie vers d’autres partenaires, au premier rang desquels figure la Chine. Ce glissement progressif mais déterminé ouvre à Pékin de nouvelles perspectives stratégiques dans un pays considéré comme clé en Afrique du Nord.
L’entreprise chinoise Dauphine d’Or trouve ainsi en Algérie une plateforme idéale pour étendre son influence régionale, s’inscrivant dans la vision plus large de la Chine de renforcer sa présence à travers le continent africain, notamment dans le cadre de son initiative des Nouvelles Routes de la Soie. Quant à l’ANABIB, ce partenariat offre une opportunité unique d’accroître ses compétences technologiques, de moderniser ses outils de production et d’élargir son influence sur le marché local et régional.
Ce nouveau partenariat illustre aussi l’évolution de la politique économique algérienne, qui privilégie désormais la diversification des partenariats internationaux et la valorisation des savoir-faire nationaux. À travers cette opération, l’Algérie entend mieux maîtriser ses filières industrielles stratégiques, réduire ses vulnérabilités face aux fluctuations du commerce mondial et développer des industries pérennes capables de soutenir sa croissance à long terme.
La perte de ce marché stratégique par la France s’inscrit donc dans une tendance plus large, où la compétition économique pour l’accès au marché algérien devient de plus en plus rude. La Chine, par sa capacité d’investissement et sa flexibilité stratégique, semble aujourd’hui mieux positionnée pour accompagner l’Algérie dans sa nouvelle phase de développement industriel. À mesure que de nouveaux accords de ce type émergent, le paysage économique algérien pourrait bien être durablement redessiné, au détriment des acteurs historiques européens.