Licenciée après 10 ans en France, à cause de son titre de séjour

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Dana, une ingénieure de 33 ans installée à Grenoble depuis dix ans, se retrouve aujourd’hui dans une situation critique à cause du renouvellement de son titre de séjour. Arrivée du Liban en 2015 pour poursuivre ses études, elle a d’abord obtenu un master à l’Université Grenoble-Alpes, avant de compléter un doctorat à Clermont-Ferrand. Revenue à Grenoble, elle a intégré le marché du travail et occupait un poste en CDI depuis plusieurs années. Mais depuis septembre 2025, Dana est privée de revenus et se retrouve sans papiers valides, après l’expiration de son titre de séjour, mettant sa vie et celle de sa famille en suspens.

Depuis février, Dana attend que la préfecture de l’Isère traite sa demande de renouvellement de titre de séjour. Elle explique : « J’avais un titre de séjour ‘vie privée et familiale’ valable jusqu’en juin. J’ai déposé ma demande en février. Quatre mois plus tard, mon titre de séjour a expiré. J’ai obtenu une attestation provisoire, mais elle ne durait que trois mois et n’a pas été renouvelée. Sans un titre de séjour en règle, mon employeur a dû me licencier. » Le délai de traitement du titre de séjour a ainsi directement impacté sa carrière et sa stabilité financière. Dana est également inquiète pour sa demande de naturalisation, actuellement en cours, et se trouve dans l’impossibilité de planifier son avenir.

Pour tenter de débloquer sa situation, Dana a dû engager un avocat et multiplier les démarches administratives. Elle n’est pas un cas isolé : selon Martine Faure Saint-Aman du collectif « Bouge ta préf 38 », de nombreux résidents à Grenoble, même en CDI et exerçant dans des métiers en tension, subissent les mêmes conséquences. « La préfecture génère, qu’elle le veuille ou non, une fabrique de sans-papiers. Des personnes rechutent après 2,5, 10 ou 15 ans de situation régulière, » explique-t-elle. La problématique touche des centaines de personnes qui voient leurs droits suspendus faute de rendez-vous ou de documents délivrés à temps, malgré des années de travail régulier et d’intégration en France.

La situation de Dana souligne également l’impact direct des retards administratifs sur le marché du travail et la vie des familles. Sans titre de séjour valide, elle ne peut percevoir le chômage, ni bénéficier de protections sociales, et fait face à des obligations financières comme un crédit immobilier à rembourser. Le titre de séjour, au cœur de sa vie professionnelle et personnelle, conditionne aujourd’hui la stabilité de sa famille et sa capacité à continuer à vivre en France.

La préfecture de l’Isère assure toutefois avoir mis en place des mesures pour réduire les délais. Elle précise : « Lorsque l’usager reçoit un document provisoire, un agent lui communique une prochaine date de rendez-vous pour le renouvellement de son titre de séjour, dans l’attente de la fin de l’instruction de la demande. » La préfecture indique également avoir délivré 14 038 titres de séjour entre le 1ᵉʳ janvier et le 15 octobre 2025, soit une hausse de 42 % par rapport à la même période en 2024.