Les Algériens ne paient-ils pas leurs soins en France ? Le ministre de la santé répond

Les Algériens ne paient-ils pas leurs soins en France ? Le ministre de la santé répond

L’affaire des soi-disant « soins impayées » des ressortissants algériens dans les hôpitaux en France refait surface, ravivant une polémique récurrente dans un contexte diplomatique déjà fragile entre Paris et Alger. Cette controverse, alimentée par des discours politiques et médiatiques, s’appuie sur des chiffres parfois contradictoires, oscillant entre réalités administratives et surenchère politique.

Lors d’une récente séance au Sénat, Yannick Neuder, ministre français de la Santé, a tenu à clarifier la situation en fournissant des données officielles. « Sur les 150 millions d’euros entre 2007 et 2023 qui concernent les financements algériens, le recouvrement est assez satisfaisant puisque jusqu’à l’heure où je vous parle, il reste 2,58 millions d’euros à recouvrir. Cela concerne le système public sur lequel on a une grande lisibilité », a-t-il affirmé. Ce chiffre contraste avec certaines estimations relayées par des médias et des figures politiques, qui évoquent des sommes bien plus élevées, souvent sans fondement précis.

L’Algérie, de son côté, insiste sur le fait qu’elle s’acquitte de ses engagements en vertu de la convention bilatérale de sécurité sociale qui la lie à la France. L’agence officielle APS a précisé : « Entre 2010 et 2019, l’Algérie a transféré un montant total de 93,7 millions d’euros aux hôpitaux français. De 2020 à 2024, 23,2 millions d’euros supplémentaires ont été versés, portant le total à plus de 116 millions d’euros. » Ces paiements, selon Alger, témoignent d’une volonté de respecter les accords conclus, contrairement aux accusations de négligence financière portées par certains acteurs politiques en France.

La principale source de discorde réside dans la vérification des dettes encore en suspens. Selon les autorités algériennes, le solde restant de 2,5 millions d’euros doit être régularisé à la suite d’un processus de validation des créances. « Nous avons demandé à plusieurs reprises la réunion de la commission mixte prévue par la convention afin de clarifier les montants et de s’assurer de l’exactitude des prestations facturées », indique une source proche du dossier. Pourtant, cette étape cruciale tarde à être organisée, un retard que l’Algérie perçoit comme une volonté délibérée d’entretenir la confusion autour de cette affaire.

Dans ce contexte, un article du journal L’Opinion a suscité une vive réaction. Le quotidien français avançait que les ressortissants algériens, notamment ceux détenteurs d’un visa touristique ou diplomatique, avaient accumulé une dette de 44,9 millions d’euros dans les hôpitaux français. Une affirmation, qui sans qu’elle soit vérifiée, a été largement relayés par les personnes ayant de la haine à l’égard de l’Algérie. Alger l’a d’ailleurs catégoriquement rejeté. « Les chiffres avancés ne reposent sur aucune base factuelle. Le montant réel des factures non encore payées par l’Algérie s’élève à 2,5 millions d’euros, comme confirmé par le ministre français de la Santé lui-même », a souligné APS dans un communiqué publié le 22 janvier.

Une autre interrogation soulevée par Alger concerne l’attribution erronée par la France de certaines factures de soins à des Algériens. « Nous avons constaté à plusieurs reprises des cas où des patients qui ne relèvent pas de la convention bilatérale ont été indûment intégrés dans le décompte des créances de l’Algérie. Ces erreurs nécessitent un examen approfondi avant tout paiement », a indiqué une source diplomatique algérienne. Cette problématique pose la question de la transparence des procédures de facturation et justifie, selon Alger, l’exigence de contrôles rigoureux avant d’honorer les sommes réclamées.

Malgré ces précisions au sujet des frais de soins des Algériens, le débat est régulièrement instrumentalisé par des personnalités politiques en France, notamment celles issues de la droite et de l’extrême droite, qui y voient une opportunité de critiquer les accords existants avec l’Algérie. Certains vont jusqu’à inscrire cette question dans un discours plus large sur le « coût de l’immigration », bien que les soins concernés s’inscrivent dans un cadre légal bien défini.

Cette affaire illustre une tendance persistante à la surenchère médiatique lorsqu’il s’agit des relations franco-algériennes. Chaque différend, même mineur, devient un prétexte à la polémique, occultant les véritables enjeux de coopération entre les deux pays. Pourtant, sur le plan médical, la collaboration entre la France et l’Algérie reste essentielle, notamment pour les patients nécessitant des soins spécialisés indisponibles en Algérie.

En définitive, cette controverse repose davantage sur des perceptions et des discours politiques que sur des faits incontestables. Les chiffres fournis par les deux parties convergent sur un point clé : l’Algérie respecte ses obligations financières et exige, en retour, une transparence totale dans le traitement de cette question. « Nous avons toujours fait preuve de bonne foi dans l’application de la convention bilatérale. Il est regrettable que ce sujet soit détourné à des fins politiques, au lieu d’être traité dans le cadre institutionnel prévu à cet effet », conclut une source algérienne proche du dossier.

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